Le nouveau droit pénal sexuel en vigueur déjà depuis juillet 2022

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LE PRINCIPE

C’est depuis juillet 2022 que le nouveau droit pénal sexuel est d’application. Il comporte plusieurs nouveautés applicables aux faits commis depuis juillet 2022. Les faits commis avant cette date relèvent toujours des anciennes dispositions.

LE CONSENTEMENT AU CŒUR DE LA RELATION SEXUELLE : LE/LA PARTENAIRE DOIT DIRE OUI ET NON PAS SIMPLEMENT NE PAS DIRE NON

L’essentiel de la réforme est d’insister sur le consentement des partenaires à la relation sexuelle.

Le consentement doit être donné librement avant la relation sexuelle et doit porter par exemple sur l’identité du partenaire, sur le type d’acte sexuel, sur l’usage d’un préservatif.

Le « devoir conjugal » n’a pas droit de cité : les relations sexuelles dans le couple doivent aussi être consenties.

Le consentement ne peut pas être déduit de la simple absence de résistance de la victime : céder n’est pas consentir.

Le consentement peut être retiré à tout moment avant ou pendant l’acte à caractère sexuel.

Il n’y a pas de consentement lorsque :

  • la victime est inconsciente
  • la victime est endormie
  • la relation sexuelle est intervenue en profitant de la situation vulnérable de la victime (peur, alcool, drogues, handicap,…) qui n’a plus son libre arbitre
  • la relation sexuelle est intervenue par violences, menaces, ruse, surprise
  • la relation sexuelle est intervenue par l’effet d’une relation d’autorité (ex. : médecin, enseignant, moniteur sportif, chef scout)
  • les partenaires sont de la même famille au sens large ou cohabitent (ex. : grand-père, frère, oncle, beau-père, demi-frère), sauf s’ils sont l’un et l’autre majeurs et consentants
  • la/le partenaire n’a pas 16 ans (sauf si, à partir de 14 ans, la différence d’âge ne dépasse pas 3 ans) : la majorité sexuelle est donc maintenue à 16 ans mais est parfois abaissée à 14 ans pour prendre en compte les « amours de jeunesse »

LES INFRACTIONS DE MOEURS

L’attentat à la pudeur laisse la place à l’atteinte à l’intégrité sexuelle : l’infraction consiste, en l’absence de consentement de la victime, à accomplir un acte à caractère sexuel sur la victime ou à lui faire exécuter un acte à caractère sexuel (ex. : attouchements sexuels, interaction via webcam)

Le viol reste défini comme consistant en ou se composant d’une pénétration sexuelle de quelque nature et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne ou avec l’aide d’une personne qui n’y consent pas : cette définition large vise la pénétration vaginale, anale, orale, complète ou incomplète, par le sexe, un doigt ou un objet ; elle désigne aussi le viol à distance (ex.: obliger une victime, via une webcam, à se pénétrer)

Le voyeurisme reste interdit : le code pénal interdit d’observer ou d’enregistrer une personne sans son autorisation et à son insu alors qu’elle est dénudée ou qu’elle se livre à une activité sexuelle explicite.

La diffusion non consentie d’images à caractère sexuel reste interdite. Faire suivre à ses amis pareille vidéo est donc interdit.

La victime peut saisir un tribunal en urgence pour que celui-ci donne l’ordre au diffuseur ou au prestataire intermédiaire de retirer immédiatement ces images ou de les rendre inaccessibles, au plus tard dans les 6 heures de la signification du jugement.

La matière des outrages aux mœurs a été modifiée : si l’exhibitionnisme reste interdit, de même que la possession d’images ou de vidéos pédopornographiques, en revanche, seule la production et la diffusion de vidéos ou de productions de contenus à caractère extrêmement pornographique ou extrêmement violent sont interdits. Le visionnage et la détention de vidéos pornographiques ne sont donc pas interdites.

L’approche et la manipulation intentionnelle de mineurs à des fins sexuelles est interdit.

Le proxénétisme ne sera réellement dépénalisé que lorsqu’une nouvelle loi à venir aura donné un statut légal aux travailleuses/travailleurs du sexe. La traite des êtres humains dans le domaine de la prostitution reste sévèrement répréhensible.

Le fait de se prostituer n’est pas une infraction, ce qui n’est pas neuf ; faire de la publicité pour son activité prostitutionnelle n’est autorisé qu’à certaines conditions (le racolage actif en rue reste interdit, pas en vitrine) .

DES PEINES PLUS SEVERES

La tendance générale de la réforme a été de prévoir des peines plus sévères pour sanctionner les infractions de mœurs, conjuguée à la réalité nouvelle que les peines d’emprisonnement sont à présent pour ainsi dire toutes mises à exécution, spécialement lorsque la victime est mineure.

En revanche, des possibilités plus importantes de bénéficier du sursis probatoire à l’exécution de (tout ou partie de) la peine d’emprisonnement ont été généralisées.

De manière générale, les peines alternatives que sont la peine de surveillance électronique (bracelet électronique), la peine de travail et la peine de probation sont exclues du champ d’application du nouveau droit pénal sexuel.

La peine d’interdiction du droit d’exercer une fonction publique est devenue obligatoire et automatique, synonyme de révocation pour les fonctionnaires (ex : enseignant dans le réseau officiel, militaire).

Le tribunal peut imposer des interdictions de résidence à proximité du domicile de la victime ; il peut aussi transmettre la copie de sa décision à l’employeur (ex : une crèche) ou à l’organe disciplinaire du condamné (ex : un puériculteur) qui est professionnellement en contact avec des mineurs.

Adrien MASSET
a.masset@avocat.be
+32 87 67 49 90